L’entreprise d’aujourd’hui ne peut pas ignorer sa responsabilité socio-environnementale. Le champ d’action est si vaste qu’une question reste en suspens : sur quels axes travailler en priorité ? Les propositions présentées agissent sur six grands thèmes propres à la RSE : les mobilités soutenables, le territoire innovant, la finance responsable, la marque positive, l’économie numérique et la citoyenneté d’entreprise.
Les propositions ont été présentées lors de la deuxième édition du Forum de Giverny, un rendez-vous annuel autour de la RSE. Plusieurs acteurs publics, économiques, dirigeants d’entreprises ou experts de la RSE partagent leurs réflexions pour développer la responsabilité socio-environnementale des entreprises.
Co-créées entre tous les participants du forums, elles ont été publiées dans le journal du Grand Paris puis proposées aux pouvoirs publics. Elles s’articulent autour de six grands thèmes qui concernent des questions essentielles pour une entreprise qui se veut responsable.
Mobilités soutenables
Comment faire évoluer le modèle des mobilités actuel pour le rendre plus soutenable au regard de la transition écologique ?
La RSE essaie d’apporter des solutions à plusieurs problématiques sociales et environnementales autour de l’entreprise. La première commence et se termine en dehors même du lieu et temps de travail : il s’agit de la mobilité des collaborateurs. En effet, il faut le rappeler, les transports sont le premier catalyseur d’émissions de CO2 selon le CITEPA.
Les propositions se concentrent sur les trajets des collaborateurs pour se rendre sur leur lieu de travail, mais également sur les véhicules de fonction.
Les propositions :
- Conditionner l’implantation de tout employeur à un plan de mobilité (PDM) permettant l’utilisation de transports décarbonés pour les salariés et l’ensemble des parties prenantes externes
- Renforcer le rôle des PDM employeur dans la poursuite de la stratégie bas carbone en rendant obligatoire l’évaluation de son impact annuel sur les émissions et l’élargissement de son champ d’action au stationnement en entreprise
- Instaurer pour tous les employeurs un compte carbone qui évalue l’empreinte de chaque salarié dans ses déplacements professionnels
- Supprimer les avantages fiscaux sur les voitures de fonction et limiter leur octroi uniquement aux salariés qui peuvent démontrer qu’ils n’ont pas d’autre moyen de transport pour leurs déplacements domicile-travail
- Aligner le barème d’indemnité kilométrique pour les voitures et les deux-roues motorisés sur le barème inférieur
Territoire innovant
Comment peut-on faire des territoires les principaux espaces de transformation et d’innovations sociétales ?
Les propositions s’intéressent aux parties-prenantes de l’entreprise : fournisseurs, partenaires, élus. L’objectif est de valoriser les ressources et savoirs-faire du territoire. Privilégier l’économie circulaire, les circuits courts, travailler avec des acteurs locaux sont autant de moyens de mettre en place une économie plus vertueuse.
En termes de développement durable, cela permet de limiter l’empreinte carbone de l’entreprise et de dynamiser le territoire. Les quatre grands axes – social, économique, environnemental, sociétal – sont impactés.
Les propositions :
- Favoriser la rencontre des parties prenantes locales pour échanger sur les enjeux de développement économique local et d’ancrage de compétences stratégiques
- Encourager le dialogue interterritorial et l’expérimentation locale afin de partager les savoirs spécifiques aux enjeux d’un territoire
- Élaborer une grille d’analyse régionale à destination des entreprises afin de s’inscrire dans une démarche de pérennité vertueuse d’ancrage local et de valorisation de ses actions
- Accélérer le déploiement de l’économie circulaire dans les territoires
Finance responsable
Comment transformer la finance afin de générer un impact positif pour répondre aux enjeux sociaux et écologiques de l’économie réelle ?
Ici, les propositions RSE se centrent sur le modèle économique des entreprises. L’objectif est d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Pour cela, des décisions stratégiques, de la transparence, une gestion différente des investissements et subventions sont exigées. La finance responsable incite également à poursuivre des objectifs de soutenabilité en plus du profit.
Les propositions :
- Inciter, sur le principe du « comply or explain », les investisseurs institutionnels dits « responsables » à aligner leurs portefeuilles d’investissements sur des trajectoires de neutralité carbone d’ici 2050
- Rendre obligatoire la publication du bilan carbone tous les 2 ans pour toutes les entreprises de plus de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires dépasse 50 millions d’euros
- Associer l’attribution de subventions adressées aux entreprises et collectivités territoriales (au niveau français et européen), à l’élaboration d’une trajectoire d’alignement avec des scénarii de soutenabilité à moyen terme de l’entreprise, notamment la neutralité carbone à horizon 2050
- Inciter les entreprises et institutions financières à mettre en place une structure de rémunération plus incitative et inclure des objectifs extra-financiers dans l’évaluation des managers et des collaborateurs, y compris dans le cadre des évaluations à 360
- Demander aux investisseurs institutionnels de définir une cible en termes de part « verte » de leurs financements, compatible avec la taxonomie verte européenne, progressant dans le temps
- Intégrer les critères de préservation des écosystèmes (qualité des sols, impact sur artificialisation, etc), dans les grilles d’analyse ESG des investisseurs en fonds propres et dans la définition des investissements se réclamant « verts » ou « durables »
Marque positive
Quels sont les leviers à activer pour valoriser les entreprises engagées dans une démarche de RSE systémique ?
Les sociétés qui s’engagent dans une transformation sociale et écologique ont besoin d’accompagnement pour atteindre leurs objectifs socio-environnementaux et de pérennité. Des experts, les acteurs publics, les personnes et entreprises de leurs réseaux peuvent les soutenir.
Les propositions :
- Nommer systématiquement un directeur RSE au comité exécutif pour mener la transformation sociale et écologique au sein de l’entreprise
- Développer la coopération entre territoires, en développant les réseaux à impacts
- Créer un poste de directeur de la RSE de l’Etat, en charge de la commande publique
- Porter un projet de réforme, au plan européen afin de moderniser la politique de l’Union européenne en matière de commande publique
- Dans un contexte de juste relance, instituer un plan de soutien financier et institutionnel des TPE/PME engagées dans une reconversion de leur modèle écologique et social
- Évaluer annuellement l’atteinte par l’État de ses objectifs écologiques et sociaux dans sa commande publique
Économie numérique
Comment concilier le développement de l’économie numérique avec une plus grande responsabilité sociale et environnementale ?
L’idée que la technologie entrave le développement durable (et vice-versa) est tenace. Entre la multiplication des équipements, la consommation d’énergie et de matières premières ou encore la production de déchets, il est vrai que les sources de pollution numérique sont nombreuses comme le montre cette infographie de l’ADEME :
Comme dans tous les domaines, le numérique est sujet aux bonnes et mauvaises pratiques. Le but ici est de repenser l’utilisation de la technologie en entreprise. La privilégisation du reconditionné, l’économie circulaire, la gestion des déchets électroniques et les solutions low-tech permettent de limiter l’empreinte carbone numérique. Côté social, l’utilisation des outils digitaux peut permettre de favoriser l’accessibilité et l’inclusion en entreprise.
Les propositions :
- Conditionner systématiquement le financement et l’accompagnement public des projets IT/numérique à leur performance en termes d’inclusion et ou de réduction des impacts environnementaux à travers l’atteinte d’un seuil minimal lors d’une analyse de cycle de vie
- Organiser une campagne d’envergure de sensibilisation du grand public au numérique responsable et inclusif accolée à des programmes spécifiques de formation tout au long du parcours scolaire et en entreprise
- Instaurer une taxe sur la valeur ajoutée réduite sur la réparation et le reconditionnement de produits et assortir une valeur de consigne au prix de vente des équipements électroniques neufs
- Créer une directive européenne « réemploi » pour maximiser le nombre d’équipements réemployés et permettre d’assurer la traçabilité des équipements tout au long de leur vie et de comptabiliser le flux « réemploi » en parallèle du flux « déchets »
- Dynamiser l’économie circulaire, l’accessibilité et la sobriété numérique par un renforcement de la transparence et de l’inclusivité dans l’entreprise, de l’exemplarité de l’État et par une gestion durable de l’ensemble du cycle de vie des équipements numériques
Citoyenneté d’entreprise
Comment engager et inclure les parties prenantes dans le projet durable de l’entreprise ?
Le développement d’une politique de RSE et, plus globalement, la transition écologique et sociale de l’entreprise peut induire des changements importants dans sa vie interne. Ainsi, chacune des parties-prenantes doit être incluse dans cette évolution. Les propositions du Forum de Giverny se concentrent sur la communication entre ces différents acteurs, l’inclusion et la formation.
Les propositions :
- Présentation annuelle de la stratégie RSE par le directeur concerné aux instances dirigeantes de l’entreprise : conseil d’administration, assemblée générale et comité social et économique (CSE)
- Indexer 50 % de la rémunération variable des dirigeants sur des objectifs mesurables de la RSE
- Insérer de manière explicite dans les accords d’intéressement des objectifs d’inclusivité et de développement durable
- Intégrer la RSE au cœur des programmes de formation obligatoire organisés par l’entreprise.
Commentaires
Vous devez être connecté pour commenter cet article